Aloha, nous voilà immergés dans le Snapdragon Summit 2025, cette cérémonie technologique orchestrée par Qualcomm sur les rivages d’Hawaï, plus précisément à Maui. L’écrin culturel et naturel est splendide, mais notre sujet se concentre ailleurs : les nouvelles architectures de processeurs destinées aux ordinateurs portables.
Il y a un an ou deux, Qualcomm avait dévoilé le Snapdragon X Elite, premier jalon sérieux pour l’ARM sous Windows. Ce premier essai montrait le potentiel mais restait davantage une démonstration de faisabilité qu’un véritable raz-de-marée face à Intel ou Apple. Désormais, le Snapdragon X2 Elite Extreme s’avance comme un manifeste de puissance.

Le X2 Elite Extreme se distingue par une organisation musclée : 18 cœurs au total, contre 12 auparavant. Douze d’entre eux appartiennent à la lignée Orion Prime, dont deux capables d’atteindre 5 GHz, une altitude inédite pour l’univers ARM. À titre de comparaison, l’Apple M4 Max culmine à 4,51 GHz. Dans l’écosystème x86, certains Ryzen ou Core Ultra grimpent un peu plus haut, mais la symbolique pour ARM est majeure. La fréquence de croisière s’établit autour de 4,6 GHz, tandis que les cœurs dits « performance » plafonnent à 3,6 GHz.
La partie graphique repose sur l’Adreno X290, cadencé à 1,85 GHz. Qualcomm conserve l’approche mémoire unifiée, mais pousse le bus à 192 bits pour une bande passante de 228 Go/s. La configuration embarque par défaut 48 Go de LPDDR5X, opérant à plus de 9500 MT/s, une prouesse rarement vue.
Selon les chiffres internes de Qualcomm, l’X2 Extreme surclasse le M4 d’Apple de 5 % en mono-cœur, devance l’Ultra 9 288 de 33 % en multicœur et le dépasse de 38 % côté GPU. Quant au NPU, il double l’efficacité du M4 en calcul IA. L’argumentaire est clair : Qualcomm se présente comme le nouveau champion de la catégorie.
Snapdragon X2 Elite | Snapdragon X Elite | Snapdragon X Plus | Apple M4 Max | Apple M4 | |
Coeurs Performant | 12x Oryon @ 4,4 GHz | 12x Oryon @ 3,8 GHz | 10x Oryon @ 3,4 GHz | 12x personnalisé @ 4,51 GHz | 4x personnalisé @ 4.40 GHz |
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Coeurs Efficient | 6x Oryon @ 3,6 GHz | – | – | 4x personnalisé @ 2,75 GHz | 6x personnalisé @ 2.85 GHz |
RAM | LPDDR5x-9523 12x 16-bit @ 4761 MHz (228 GB/s) | LPDDR5x-8448 8x 16-bit @ 4224 MHz (135 GB/s) | LPDDR5x-8448 8x 16-bit @ 4224 MHz (135 GB/s) | LPDDR5x-8533 32x 16-bit @ 4266 MHz (546 GB/s) | LPDDR5x-7500 8x 16-bit @ 3750 MHz (120 GB/s) |
GPU | Adreno à 1,85 GHz DirectX 12 | Adreno DirectX 12 (4,6 TFLOPS) | Adreno DirectX 12 (3,8 TFLOPS) | GPU personnalisé Apple 40x (17 TFLOPS) | 10x GPU personnalisé Apple (4,26 TFLOPS) |
Modem | 5G (sub-6GHz+mmWave) (Snapdragon X75) | 5G (sub-6GHz+mmWave) (Snapdragon X65) | 5G (sub-6GHz+mmWave) (Snapdragon X65) | – | – |
Connectivité | Wi-Fi 7 Bluetooth 5.4 (FastConnect 7800) | Wi-Fi 7 Bluetooth 5.4 (FastConnect 7800) | Wi-Fi 7 Bluetooth 5.4 (FastConnect 7800) | Wi-Fi 6E Bluetooth 5.3 | Wi-Fi 6E Bluetooth 5.3 |
Processus | TSMC N3E (“3 nm”) | TSMC N4 (“4 nm”) | TSMC N4 (“4 nm”) | TSMC N3E (“3 nm”) | TSMC N3E (“3 nm”) |
Toute la gamme X2 ne se limite pas à l’Extreme. Les modèles inférieurs réduisent la voilure : 12 cœurs seulement, 6 Orion Prime et 6 performance, fréquence réduite (4 GHz avec turbo à 4,7), cache CPU plus restreint, bus mémoire ramené à 128 bits et GPU déclassé (Adreno X285 à 1,7 GHz). Ces compromis créent une hiérarchie marquée entre les références.
Snapdragon X2 Elite Extreme
Les premiers benchmarks offrent une vision plus concrète. Sur Cinebench 2024, l’Extreme affiche 160 points en mono-cœur et 1974 en multicœur. Seul l’Apple M4 garde une petite avance en single, mais en multi le X2 se positionne remarquablement bien. Sous Geekbench 6, les scores (4078 en single, 23 362 en multi) dominent tout le reste du paysage.
Sur la partie graphique, l’évolution est notable : 5646 points sur 3DMark Wild Life Lite, soit une moyenne de 42 FPS, écrasant nombre de rivaux x86 et surpassant même le Mac Mini M4. Même sur Wild Life classique, le résultat dépasse 1300 points, performance rare pour un GPU intégré ARM.
Au-delà des chiffres bruts, l’enjeu réside dans l’écosystème. Windows sur ARM n’avait pas décollé avec la première vague Snapdragon X, malgré l’appui de Microsoft. Aujourd’hui, plus de 90 % des applications Windows sont natives ARM, dont la suite Adobe (Photoshop, Premiere, Lightroom) ou encore DaVinci Resolve. Les limitations dues à la couche d’émulation Prism se réduisent, bien qu’elles demeurent problématiques pour le jeu vidéo. Les titres AAA n’existent toujours pas nativement en ARM, hormis quelques exceptions anecdotiques.
L’argument massue reste l’autonomie et la gestion de la veille. L’efficacité énergétique ARM écrase toujours le x86, et si l’on ajoute des performances brutes supérieures, l’équation devient redoutable. Un ultraportable Windows avec Snapdragon X2 Extreme pourrait offrir silence, endurance et vélocité, un cocktail rêvé pour les créatifs plus que pour les joueurs.
Le problème structurel n’est pas technique, mais commercial : Qualcomm reste une marque peu visible pour le grand public, noyée derrière les étiquettes d’Intel et AMD. Les constructeurs mentionnent Snapdragon comme une option parmi d’autres, rarement comme un étendard.
Pour imposer sa puce, Qualcomm devra provoquer un basculement culturel, et peut-être diversifier ses formats au-delà du simple notebook. Mini-PC ultrafins, hybrides, voire consoles portables sous Windows ARM pourraient incarner cette ambition.
Le Snapdragon X Elite prouvait qu’il existait une place pour ARM. Le X2 Elite Extreme démontre que Qualcomm veut l’occuper avec force. Reste à savoir si le marché suivra.